Ce qui a changé avec la réforme des retraites de 2010

Malgré une succession de réformes (1993, 1999, 2003…), le système français de retraite a connu des difficultés de financement croissantes. C'est pour y remédier que la réforme de 2010 a adopté 2 mesures fortes portant sur l'âge de départ. Mais cette réforme comprenait de nombreux autres volets : convergence des régimes, éléments de solidarité, mesures financières… Présentation des principales mesures.

Rétablir l'équilibre financier du système de retraite

Les 2 « mesures d'âge »

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites est surtout connue pour ses 2 « mesures d'âge » :

  • L'âge légal de départ à la retraiteÂge légal de départ à la retraite<p>Âge à partir duquel une personne peut demander à prendre sa retraite. En France, il est de 62 ans pour les assurés nés à partir de 1955.</p> a été relevé de 60 à 62 ans ;
  • L'âge permettant de bénéficier du taux pleinTaux plein<p>Taux maximum de calcul d'une retraite dont peut bénéficier l'assuré dans tous les régimes. Pour prétendre à une pension de retraite à taux plein, il faut remplir des conditions d'âge et de durée d'assurance.</p> a été relevé de 65 à 67 ans.

Ces 2 mesures sont entrées progressivement en vigueur à partir de la génération née en 1951 jusqu'à celle née en 1955. Ainsi, si la transition sur l'âge légal de départ à la retraite s'est terminée en 2016, la transition sur l'âge permettant de bénéficier du taux plein se poursuivra jusqu'en 2021.

Ces mesures ont concerné les salariés du secteur privé, les agriculteurs, les travailleurs non-salariés et les fonctionnaires. Pour les agents des régimes spéciauxRégimes spéciaux<p>Ensemble des régimes de retraite couvrant certaines catégories particulières de salariés du secteur public (SNCF, RATP), de certaines branches d'activité (EDF, GDF) ou d'autres professions (ex : les marins, salariés de l'Opéra de Paris, de la Banque de France, etc.).</p> et de la fonction publique (qui bénéficiaient de conditions plus avantageuses), l'âge légal de départ et l'âge permettant de bénéficier du taux plein ont été relevés de 2 ans, suivant le même calendrier.

Suite à cette réforme, la durée de cotisationDurée d'assurance cotisée<p>Nombre total de trimestres cotisés, c'est-à-dire de trimestres au cours desquels l'assuré a effectivement versé des cotisations aux régimes de retraite.</p> pour bénéficier de la retraite à taux plein a été allongée d'1 trimestre, par décret du 3 août 2011, pour atteindre le nombre de 166 (41,5 ans) pour les assurés nés à partir de 1955.

Un certain nombre d'exceptions ont été prévues :

Le dispositif de départ anticipé des travailleurs handicapés a continué, pour les fonctionnaires, d'être possible à l'âge de 60 ans.

Certains assurés ont pu continuer à bénéficier d'une retraite à taux plein à 65 ans (au lieu de 67 ans) :

  • Les parents de 3 enfants nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1955, ayant interrompu ou réduit leur activité professionnelle pour élever l'un d'eux pendant l'équivalent d'1 an au cours de ses 3 premières années, à condition d'avoir cotisé au préalable au moins 8 trimestresTrimestre<p>Unité de base de calcul de la durée d'assurance, utilisée dans la plupart des régimes de retraite de base.</p> ;
  • Les parents d'un enfant handicapé, qui s'en sont occupés pendant au moins 30 mois ;
  • Les aidants familiaux ayant interrompu leur activité professionnelle à ce titre pendant au moins 30 mois consécutifs ;
  • Les assurés handicapés ayant un taux d'incapacité de 50 % au moins ;
  • Les bénéficiaires du volet « pénibilité » inclus dans cette réforme.

À noter : les assurés qui avaient effectué des rachats de trimestres rendus inutiles par l'augmentation de l'âge de départ en retraite, ont pu obtenir un remboursement. Les trimestres devaient avoir été rachetés avant le 13 juillet 2010, et le bénéficiaire ne devait pas avoir encore pris sa retraite.

L'apport de nouvelles ressources

Le volet financier de cette réforme ne s'est pas limité à la loi du 9 novembre 2010. La Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2011, la loi de finances pour 2011 et la loi relative à la gestion de la dette sociale ont apporté des ressources supplémentaires au système de retraite.

Pour les ménages, les taux de prélèvement ont augmenté sur la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, les « retraites chapeaux » (rente article 39), les plus-values immobilières et les dividendes.

Pour les entreprises, la taxation des stock-options a augmenté, de même que le « forfait social » acquitté par les employeurs sur les abondements au Perco, PEEPEE ou Plan d'épargne entreprise<p>Dispositif d'épargne salariale proposé par une entreprise, qui permet à ses salariés de se constituer une épargne grâce aux sommes versées (participation, intéressement, versement volontaire et abondement de l’entreprise). Celles-ci sont bloquées 5 ans (sauf cas de déblocage anticipé).</p> et PEIPEI (Plan d'épargne interentreprises)<p>Système collectif d’épargne salariale commun à plusieurs entreprises, prises individuellement ou appartenant à la même branche d’activité ou au même bassin d’emploi. </p>.

Enfin, un certain nombre de niches fiscales et sociales ont été réduites (essentiellement sur les modalités d'imposition des plus-values et le mode de calcul des allègements de charges sur les bas salaires).

Le renforcement de l'épargne retraite

Pour tous les contrats d'épargne retraite, de nouveaux cas de sortie anticipée ont été ajoutés (surendettement et décès du conjoint ou partenaire de Pacs).

Sur l'épargne individuelleÉpargne retraite individuelle<p>Produits d'épargne destinés à se constituer un complément de retraite que l'assuré peut souscrire de sa propre initiative auprès d'un établissement habilité (banque, assurance, mutuelle, etc.). Parmi ces produits, on compte le PERP, le contrat Madelin (pour les indépendants), etc.</p>, la réforme 2010 a permis aux bénéficiaires d'un Plan d'épargne retraite populaire (Perp)PERP ou Plan d'épargne retraite populaire<p>Produit d'épargne retraite qui permet, à titre individuel, de se constituer un complément de revenus pour la retraite. L'épargne accumulée est versée sous forme de rente. Certains contrats peuvent autoriser une sortie en capital à hauteur de 20 % maximum. </p> ou d'un contrat Préfon de percevoir une partie de leurs droits à la retraite sous forme de capital au moment de la liquidation, et aux rentes des contrat MadelinMadelin (contrat)<p>Contrat permettant aux travailleurs non-salariés (hors agriculteurs) d'épargner, en bénéficiant d'avantages fiscaux sur les cotisations, afin de percevoir une rente au moment du départ à la retraite.</p> d'être cumulées avec des revenus d'activité.

Sur l'épargne d'entrepriseÉpargne retraite collective<p>Produits d'épargne collective mis en place par les entreprises au profit de leurs salariés afin d'aider ses derniers à se constituer une épargne en vue de leur retraite (ex : PER Entreprises).</p>, cette réforme a élargi les situations dans lesquelles l'entreprise est tenue de proposer les régimes de retraite supplémentaire à l'ensemble de ses salariés. Ces derniers ont également bénéficié de la possibilité d'effectuer des versements volontaires dans le cadre des contrats « PER Entreprises » ex « article 83 »PER Entreprises (ex « Article 83 ») (contrat)<p>Dispositif d'épargne retraite, mis en place par certaines entreprises, pour tout ou partie de l'effectif. Il est financé par des cotisations de l’employeur et/ou des salariés. L'épargne accumulée est versée sous forme de rente au moment de la retraite.</p>.

Préserver la solidarité

Une 1re prise en compte de la pénibilité

Le départ à 60 ans a été maintenu pour les personnes victimes de la pénibilité au travail, prise en compte pour la 1re fois dans le système de retraite.

Étaient concernés les salariés présentant une incapacité permanente du fait de leurs conditions de travail. À partir d'un seuil d'incapacité de 20 %, la reconnaissance était automatique. Entre 10 % et 20 %, il fallait avoir été exposé pendant 17 ans à au moins 1 facteur de risques professionnels et prouver que l'incapacité était liée à cette exposition.

En savoir plus sur la pénibilité dans le système de retraite.

Cette mesure « réparatrice » s'est accompagnée d'un certain nombre de dispositions « préventives ». La prévention de la pénibilité fait depuis 2010 partie des responsabilités de l'employeur en matière de santé au travail. L'entreprise a vu ses obligations renforcées : tenue d'un carnet de santé au travail, de fiches individuelles pour les salariés chargés de travaux pénibles et, dans les entreprises de plus 50 salariés, mise en place d'un accord ou d'un plan d'action contre la pénibilité au travail sous peine d'acquitter une contribution de 1 % de la masse salariale.

Autres mesures de solidarité

Pour l'égalité hommes-femmes

Depuis 2010, les entreprises de plus de 50 salariés qui ne mettent pas en place un plan d'action contre les inégalités salariales hommes-femmes doivent là aussi verser à l'État une contribution de 1 % de leur masse salariale.

Depuis le 1er janvier 2012, pour améliorer les retraites des femmes, les indemnités journalières perçues pendant le congé maternité sont entrées dans le salaire de référence servant au calcul de la pension de retraite.

Pour les seniors

La loi a institué une aide à l'embauche pour les employeurs qui recrutent des demandeurs d'emploi de plus de 55 ans. Le tutorat a été encouragé.

La retraite progressive a été pérennisée : les assurés d'au moins 60 ans ayant cotisé 150 trimestres peuvent depuis 2010 cesser progressivement leur activité, en percevant une partie de leur pension de retraite.

Pour les polypensionnés

La durée minimale pour bénéficier d'une pension de la fonction publique, qui était de 15 ans jusqu'en 2010, a été abaissée à 2 ans. Auparavant, les assurés qui avaient effectué une petite partie de leur carrière dans la fonction publique (moins de 15 ans) voyaient ces années assimilées au régime général. Ils peuvent depuis bénéficier, pour ces années-là, d'une pension de la fonction publique.

Pour les demandeurs d'emploi

L'Allocation équivalent retraite (AER) a continué à être versée jusqu'à ouverture des droits à la retraite aux demandeurs d'emploi qui en bénéficiaient avant le 31 décembre 2010.

Droits familiaux

L'allocation veuvageAllocation veuvage<p>Indemnisation temporaire du conjoint d'un assuré décédé, salarié du régime général ou de l'agriculture, sous certaines conditions.</p> a été rétablie. Ce dispositif permet au conjoint survivant d'une personne décédée en activité de bénéficier d'une allocation mensuelle, sous certaines conditions, pendant 2 ans au maximum.

À noter : Une mesure a réduit, au contraire, la solidarité du système : la suppression de la majoration pour conjoint à charge. Auparavant, les retraités dont le conjoint disposait de faibles ressources pouvaient bénéficier à certaines conditions d'une majoration de leur pension. Ce n'est plus le cas depuis le 1er janvier 2011. Cependant, ceux qui percevaient cette majoration à cette date l'ont conservée.

Un système de retraite plus juste

Réduire les différences entre les régimes de retraite

La convergence des régimes spéciaux s'est poursuivie, dans la lignée de la réforme des retraites de 2003.

Le taux de cotisation salariale du secteur public a augmenté pour se rapprocher de celui secteur privé. La réforme de 2010 prévoyait de le faire passer de 7,85 % à 10,55 % à l'horizon 2020. Mais depuis, une réforme de 2013 a prévu une autre hausse afin d'atteindre 11,10 % vers ce même horizon.

Les règles en vigueur dans la fonction publique ont été alignées sur le secteur privé pour le calcul de la surcoteSurcote<p>Majoration appliquée au montant de la pension d'un assuré ayant atteint l'âge légal de départ en retraite et qui a continué à travailler au-delà de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein.</p> et le dispositif en faveur des carrières longues.

Une règle particulièrement avantageuse dont bénéficiaient les fonctionnaires a été supprimée. Elle offrait la possibilité de partir à la retraite au bout de 15 ans de service pour les parents d'au moins 3 enfants (ne sont pas concernés les agents ayant accompli 15 ans de services effectifs au 1er janvier 2012 et parents de 3 enfants à cette date).

Une meilleure information sur les retraites

Les nouveaux cotisants reçoivent depuis 2010 une information générale sur le fonctionnement du système, dès lors qu'ils ont validé 2 trimestres dans la même année. En outre, l'entretien gratuit et personnalisé que tout assuré peut demander à partir de ses 45 ans a un contenu plus complet. Le Relevé de situation individuelle (RIS)Relevé de situation individuelle (RIS)<p>Document envoyé tous les 5 ans à partir de 35 ans. Il récapitule tous les droits acquis par l'assuré dans tous les régimes de retraite obligatoires de base et complémentaire.</p> peut désormais être envoyé par voie électronique.

Depuis 2010, les expatriés peuvent aussi bénéficier, avant leur départ à l'étranger, d'une information complète sur leurs droits à la retraite.

La loi a également complété les obligations d'information des compagnies d'assurance sur les contrats d'épargne retraite, qui incluent désormais une évaluation de la rente et des possibilités de transfert vers un autre contrat.

Ce qu'il faut retenir sur la réforme des retraites de 2010

  • L'âge légal de départ à la retraite est passé de 60 à 62 ans et l'âge permettant de bénéficier d'un taux plein de 65 à 67 ans.
  • Les règles de cotisation, de surcote et de carrières longues du régime de la fonction publique sont progressivement alignées, depuis 2010 jusqu'en 2020, sur celles du secteur privé.
  • À partir d'un taux d'incapacité de 10 %, le dispositif pénibilité peut permettre de prendre sa retraite dès 60 ans.
  • Les entreprises de plus de 50 salariés ont depuis 2010 des responsabilités renforcées en matière de pénibilité et d'égalité hommes-femmes (sous la menace d'une amende de 1 % de la masse salariale).
  • L'allocation veuvage est rétablie (ouverte pendant 2 ans au conjoint survivant).
  • Les nouveaux cotisants qui ont validé 2 trimestres dans la même année reçoivent désormais une information générale sur le système.

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