Handicap, invalidité et retraite : quels dispositifs en France ?

Handicap et invalidité, dispositifs retraite

Travailler lorsque l'on a un handicap ou une invalidité demande de redoubler d'effort. C'est pourquoi le législateur a prévu un certain nombre d'aménagements pour les personnes en situation de handicap ou d'invalidité, y compris au niveau de l'assurance vieillesse. Ainsi, les régimes de retraite français prévoient que :

  • Les personnes handicapées pendant la majeure partie de leur carrière peuvent, à certaines conditions, partir en retraite anticipée, à partir de 55 ans.
  • Les personnes invalides à la fin de leur carrière peuvent bénéficier de la retraite à taux plein pour inaptitude au travail, même si elles ne remplissent pas les conditions de durée d'assurance.

La retraite anticipée pour les personnes handicapées

La retraite anticipée pour handicap existe dans l'ensemble des régimes de retraite. Elle concerne essentiellement les personnes dont le handicap remonte à la naissance ou à la jeunesse, car il suppose que l'assuré ait effectué la plus grande partie de sa vie professionnelle en situation de handicap.

Les salariés, fonctionnaires et non-salariés reconnus handicapés peuvent partir à la retraite à partir de 55 ans s'ils remplissent 3 conditions :

  • une certaine durée d'assurance validéeDurée d'assurance validée<p>Nombre total de trimestres cotisés, auxquels s'ajoutent les trimestres dits « assimilés », qui sont attribués sans cotisations dans certaines circonstances : périodes de chômage, de maladie, de maternité, de service militaire, majorations pour enfants, etc.</p> ;
  • une certaine durée d'assurance cotiséeDurée d'assurance cotisée<p>Nombre total de trimestres cotisés, c'est-à-dire de trimestres au cours desquels l'assuré a effectivement versé des cotisations aux régimes de retraite.</p> ;
  • un taux d'incapacité de 50 % au minimum tout au long de ces durées d'assurance.

Les conditions de durée d'assurance

Pour pouvoir partir en retraite anticipée, les travailleurs handicapés doivent justifier, tous régimes confondus, des durées d'assurance suivantes, calculées sur la base des durées requises pour une retraite à taux pleinTaux plein<p>Taux maximum de calcul d'une retraite dont peut bénéficier l'assuré dans tous les régimes. Pour prétendre à une pension de retraite à taux plein, il faut remplir des conditions d'âge et de durée d'assurance.</p> :

Durée d'assurance nécessaire pour partir à la retraite anticipée au titre du handicap
Année de naissanceAge minimum de départ à la retraiteDurée totale d'assurance (en trimestres)Durée totale d'assurance cotisée (en trimestres)
1958 à 196059, 60 ou 61 ans8767
1961 à 196355 ans128108
 56 ans11898
 57 ans10888
 58 ans9878
 59, 60 ou 61 ans8868

1964 à 1966

55 ans129109
 56 ans11999
 57 ans10989
 58 ans9979
 59, 60 ou 61 ans8969

 

Rappelons que la durée d'assurance requise pour bénéficier d'un taux plein est de 160 à 172 trimestresTrimestre<p>Unité de base de calcul de la durée d'assurance, utilisée dans la plupart des régimes de retraite de base.</p> suivant l'année de naissance. Pour les retraités handicapés, la retraite anticipée donne directement droit au taux plein. 

La condition d'incapacité

L'assuré doit pouvoir justifier, pour toute la durée d'assurance et de cotisation définie ci-dessus, d'un taux d'incapacité d'au moins 50 %.

Avant la réforme de 2014, le taux d'incapacité minimal s'élevait à 80 % mais il était également possible de prétendre à la retraite anticipée si l'on pouvait justifier de la Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) tout au long des durées d'assurance validée et cotisée, et requises pour le dispositif.

La réforme a supprimé cette possibilité à partir de 2016. Cependant, même si vous faites votre demande après cette date, les périodes de RQTH antérieures au 1er janvier 2016 comptent pour la retraite anticipée pour handicap.

La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé est délivrée par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH).

La liste des organismes qui peuvent attester de votre situation de handicap est donnée dans cet arrêté.

Le montant de la pension de base

En cas de départ anticipé pour handicap, la pension est toujours calculée à taux pleinTaux plein<p>Taux maximum de calcul d'une retraite dont peut bénéficier l'assuré dans tous les régimes. Pour prétendre à une pension de retraite à taux plein, il faut remplir des conditions d'âge et de durée d'assurance.</p>, quel que soit le régime.

Si l'assuré n'a pas validé, tous régimes confondus, la durée requise normalement pour un taux plein (entre 160 et 172 trimestres selon l'année de naissance), sa pension est certes calculée au prorata de la durée effectivement validée, mais ne subit pas de décote. En outre, elle bénéficie d'une majorationMajoration<p>Avantage supplémentaire en matière de retraite lié à la situation personnelle de la personne (ex : majoration de la pension de retraite pour enfants).</p>, calculée en fonction de la proportion de trimestres cotisés dans un régime donné en tant que handicapé au regard du total de ses trimestres validésTrimestre validé<p>Trimestre cotisé ou assimilé, pris en compte pour le calcul de la durée d'assurance.</p>. La formule est la suivante :

(Durée d’assurance cotisée au régime général en étant handicapé / durée totale d’assurance au régime général en étant non handicapé) / 3 

Attention : les durées cotisées et validées utilisées pour calculer la majoration sont bien les durées d'assurance dans le régime considéré, celui pour lequel on calcule la pension. Les durées cotisées et validées utilisées ci-dessus pour déterminer le droit au départ anticipé sont, elles, les durées tous régimes confondus.

Si vous n'avez cotisé qu'à un seul régime de baseRégime de retraite de base<p>Premier niveau de retraite obligatoire. En fonction de leur catégorie socio-professionnelle, les assurés sont affiliés à un <strong>régime de retraite de base </strong>(ex : régime général des salariés, régime agricole, régime des indépendants, régime des fonctionnaires, etc.).</p> tout au long de votre carrière, cela ne fait pas de différence. Mais pour les polypensionnés, votre durée d'assurance totale et votre durée d'assurance dans chaque régime ne sont pas les mêmes. On calculera alors la majoration dans chacun des régimes.

Exemple : Pierre, né en 1958, prend sa retraite à 56 ans. Il a cotisé 100 trimestres au régime général des salariés en justifiant d'une incapacité de 50 % et validé 130 trimestres au total (handicap justifié ou non). Il n'a dépendu d'aucun autre régime de base.

La pension qu'il percevrait s'il avait validé une carrière complète, soit 167 trimestres, s'élèverait à 12 000 € par an (montant obtenu, puisqu'il est au régime général, en faisant la moyenne de ses 25 meilleures années de salaire).

Sa pension est d'abord réduite au prorata de la durée effective de sa carrière, soit 130 trimestres. Sa pension est égale à : 12 000 € x 130/167 = 9 341 € par an.

La décote de 1,25 % par trimestre manquant ne s'applique pas.

La pension bénéficie en revanche d'une majoration, calculée de la façon suivante : trimestres cotisés en période de handicap / trimestres validés au total : (100/130) / 3 = 0,26. Sa pension est augmentée de 26 %, soit 9 341 € x 1,26 = 11 770 € par an.

La pension majorée ne peut toutefois pas dépasser le montant qu'elle aurait atteint si l'assuré avait validé la durée requise complète d'assurance (soit, dans notre exemple, 12 000 €).

La retraite complémentaire

La plupart des régimes complémentairesRégime de retraite complémentaire<p>Régime de retraite dont les prestations s'ajoutent à celles du régime de base (ex : régime Agirc-Arrco pour les salariés cadres et non-cadres, régime Ircantec pour les agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, etc.).</p> permettent également le départ anticipé pour handicap. L'Arrco-Agirc (salariés du privé), l'Ircantec (salariés non titulaires de la fonction publique), le SSI complémentaire (artisans, commerçants, industriels et indépendants), le régime complémentaire obligatoire des exploitants agricoles (RCO) permettent tous à leurs assurés de partir à la retraite anticipée pour handicap à partir de 55 ans, dès lors qu'ils remplissent les conditions dans le régime de base.

Aucune décoteDécote<p>Réduction définitive appliquée au montant de la pension d'un assuré. Elle s'applique lorsque l'assuré choisit de partir à la retraite alors qu'il n'a pas atteint la durée de cotisation requise pour percevoir une retraite à taux plein.</p> n'est appliquée à la pension complémentaire dans ce cas. En revanche, celle-ci ne bénéficie pas de la majoration prévue dans le régime de base.

Il existe 2 exceptions :

  • Les régimes complémentaires des professions libérales ne permettent pas de liquider sa pension complémentaire en anticipation pour handicap (sauf pour la Carpimko, à partir de 55 ans) 
  • La RAFP, la retraite complémentaire des fonctionnaires, ne prévoit aucun cas de départ anticipé avant l'âge légal de la retraite.

L'Allocation aux adultes handicapés (AAH)

Les personnes en situation de handicap peuvent bénéficier d'une aide financière qui leur permet de s'assurer un minimum de ressources.

Pour l'obtenir, les demandeurs doivent avoir plus de 20 ans, ne pas dépasser un certain montant de ressources, (qui change selon que vous vivez seul ou en couple et avec ou sans enfant) et avoir atteint un taux d'incapacité de :

  • 80 %, sans autre condition ;
  • 50 à 79 %, si la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) reconnaît que vous rencontrez des difficultés d’accès à un emploi.

La pension de retraite pour inaptitude au travail ou pour incapacité permanente

L’inaptitude au travail et l’incapacité permanente sont 2 choses différentes : 

  • l’inaptitude est le fait de ne pas pouvoir effectuer les missions de son poste en raison de votre état mental et/ou physique  ;
  • l’incapacité permanente est le fait d’être incapable de travailler en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, et ce, de façon irréversible.

L’inaptitude au travail vous permet de partir à la retraite à taux plein à 62 ans. 

L’incapacité permanente vous permet de partir à la retraite à taux plein à partir de :

  • 60 ans, s’il s’agit d’une incapacité permanente d’au moins 10 % ;
  • 55 ans, s’il s’agit d’une incapacité permanente d’au moins 50 % et que vous réunissez un certain nombre de trimestres (cotisés et validés). 

Ces dispositifs de liquidation à taux plein avant l’âge légal existent dans l’ensemble des régimes de base et complémentaires (y compris ceux des professions libérales). 

Comment bénéficier de l’Allocation aux adultes handicapés ?

Pour bénéficier de la retraite à taux plein pour inaptitude, il faut avoir 62 ans et être dans l'une de ces situations :

  • reconnu inapte au travail par le médecin du travail ;
  • invalide avant 62 ans ;
  • titulaire d’une retraite de veuf ou veuve ; 
  • titulaire de l’allocation aux adultes handicapés ;
  • titulaire de la carte d’invalidité avec au moins 80 % d’incapacité permanente ; 
  • reconnu inapte pour l’allocation spéciale ; 
  • enseignant du privé sous contrat et titulaire d’un avantage temporaire de retraite au titre de l’invalidité. 

En 2024 , la pension de retraite mensuelle pour inaptitude au travail ne peut pas être inférieure à 746,71 €  € (le minimum contributif).

Cas particulier : la pension d'invalidité

Si vous êtes en situation d’invalidité et que vous percevez une pension d’invalidité, cette dernière se transforme en pension de retraite pour inaptitude lorsque vous atteignez 62 ans. Si vous exercez une activité professionnelle ou êtes en recherche d’emploi à cet âge, vous pouvez refuser ce changement et continuer à bénéficier de votre pension d’invalidité, jusqu’à 65 ans pour les assurés handicapés. 

Les trimestres obtenus grâce à la pension d’invalidité sont des trimestres validés et donnent droit à des points de retraite complémentaire. 

Il existe également des dispositifs en faveur des personnes qui ont la charge de parents handicapés à leur domicile.

Ce qu'il faut retenir sur les dispositifs "invalidité et retraite" en France

La retraite des personnes handicapées

Elle s'applique aux personnes qui ont réalisé la majorité de leur vie professionnelle en situation de handicap.

Les personnes handicapées peuvent partir en retraite à partir de 55 ans sous réserve de remplir des conditions de durée d'assurance cotisée et validée et si le taux d'incapacité est au moins égal à 50 %.

Aucune décote n'est appliquée lors de la liquidation de leur retraite.

Les personnes en incapacité permanente peuvent partir à la retraite à taux plein à partir de 55 ans (selon le degré d’incapacité et sous réserve d’un certain nombre de trimestres cotisés et validés) ou bien à 60 ans (sans condition de trimestres).

Les personnes reconnues inaptes au travail peuvent partir à la retraite à taux plein à 62 ans, sans condition de durée d’assurance. Leur pension d’invalidité ne peut pas être inférieure au minimum contributif. 
 

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