La retraite dans le monde (hors Europe)

7,5 %

du PIB dépensé en retraites dans l'OCDE (2015)

C'est significativement moins qu'en France (13,9 %), alors que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est composée en majorité de pays développés. Si l'Europe occidentale se distingue par l'importance de ses systèmes de solidarité, les questions de la Sécurité sociale (dont la retraite) se posent dans toutes les régions du monde. Les réponses apportées dépendent de l'histoire des pays, mais aussi du stade de développement auquel ils sont parvenus. Faisons le point sur l'organisation de la retraite, hors Europe occidentale.

Les pays développés hors Europe de l'Ouest : équilibrer les régimes

La part des dépenses de retraite dans les pays développés

Les pays riches, hors de l'Europe, ont dans l'ensemble adopté des modèles d'inspiration anglo-saxonne en matière d'assurance vieillesse. Ainsi, la part des dépenses publiques de retraite dans le PIB de la plupart de ces pays est inférieure à la moyenne de l'OCDE (8,2 % en 2013) : 4,6 % au Canada, 7 % aux États-Unis, 5,2 % en Australie ou encore 5,1 % en Nouvelle Zélande. Seul le Japon (12,1 %) fait figure d'exception mais seulement depuis peu. En effet, au début des années 1990, le pays du Soleil Levant était en dessous de la moyenne de l'OCDE. Avec la population la plus âgée du monde (derrière Monaco !), il a dû faire face à une réelle évolution de la société liée au vieillissement et au ralentissement de l'économie.

Au Japon comme aux États-Unis, au Canada et en Australie, les plus de 65 ans dépendent des régimes publics de retraite pour moins de la moitié de leur revenu (et même pour à peine plus du 1/3 aux États-Unis).

Comme en Europe, ces pays affrontent le double défi du vieillissement de leur population et du ralentissement de la croissance, ce qui engendre des difficultés de financement pour les systèmes publics de retraite. Or, la situation est très inégale en termes de taux de natalité (nombre moyen d'enfants par femme). La Banque mondiale estimait ainsi qu'en 2016, là où les États-Unis (1,8 enfant par femme), la Nouvelle Zélande (1,9) et l'Australie (1,8) connaissent une démographie relativement dynamique, réduisant sans l'annuler l'effet de l'allongement de l'espérance de vie, le Canada (1,6) et plus particulièrement le Japon (1,4) sont dans une situation plus difficile ; d'autant plus que le Japon, contrairement au Canada, n'a quasiment aucune immigration.

À noter : le seuil de renouvellement (permettant à la population d'un pays de ne pas baisser) est autour de 2,05 enfants par femme.

Les solutions pour équilibrer les régimes

De nombreuses réformes des systèmes de retraite ont été entreprises dans ces pays au cours des 20 dernières années. Il s'agit, pour l'essentiel, de réformes qui affectent les paramètres du système (« réformes paramétriques ») sans en modifier la nature (« réformes systémiques ») : relèvement de l'âge de départ à la retraite, baisse des prestations plutôt que hausses de cotisations. Les régimes complémentaires par capitalisationCapitalisation (retraite par)<p>Système dans lequel, une fois parvenu à l'âge de la retraite, l'assuré récupère l'agent qu'il a épargnée avec les intérêts, sous forme de capital ou de rente.</p> ont généralement été encouragés. Le plus souvent, l'objectif est de réduire la pauvreté des personnes âgées et de permettre aux retraités de maintenir, autant que faire se peut, leur pouvoir d'achat après la cessation d'activité.

Les pays émergents : accompagner la croissance

Les systèmes de retraite dans les pays émergents

Dans les pays d'Amérique du Sud, de l'ancien monde communiste, d'Asie et d'Afrique du Nord, la problématique est un peu différente. Leur transition démographique est en cours même si elle se fait à des rythmes différents. Si, au cours des dernières années, voire des dernières décennies, le taux de fécondité a chuté dans certains pays comme la Chine (1,6 enfant par femme), il reste encore élevé dans d'autres pays comme l'Inde (2,3 enfants). Avec une population encore relativement jeune, ces pays devraient être concernés par le vieillissement dans les décennies à venir du fait notamment de l'allongement de l'espérance de vie.

Pour les pays économiquement émergents, la problématique des retraites est liée à celle du développement. Ils ont souvent adopté des modèles dits « bismarckiens » (où les cotisations financent et donnent droit à la retraite, en opposition aux modèles « beveridgiens » où l'impôt finance un système accessible à tous). Or, les modèles bismarckiens posent un problème : ils supposent que la majeure partie de la population active travaille et cotise, ce qui n'est pas toujours évident dans des pays où l'économie informelle est importante. La faiblesse relative des revenus incite peu à épargner pour l'avenir, et fournit une assiette réduite pour financer des prestations sociales suffisantes. Il faut en outre que les institutions, publiques ou privées, inspirent suffisamment confiance pour que les personnes acceptent de leur confier leur épargne à très long terme, plutôt que de compter sur les solidarités traditionnelles.

Les préconisations des institutions internationales

Depuis les années 1990, la Banque Mondiale préconise des systèmes de retraite à 3 piliers :

  1. un régime d'allocations minimales pour les plus démunis financé par l'impôt ;
  2. un régime alimenté par des cotisationsCotisation retraite<p>Somme prélevée sur les salaires et/ou les revenus professionnels afin de financer les retraites.</p> prélevées sur les revenus et versant des pensionsPension de retraite<p>Somme versée périodiquement à un assuré après la liquidation de sa retraite, après cessation totale ou partielle de l'activité professionnelle.</p> proportionnelles aux cotisations, fonctionnant de préférence par capitalisation ;
  3. des régimes complémentaires volontaires privés.

La capitalisation est recommandée par la Banque mondiale pour plusieurs raisons :

  • les individus seraient plus incités à verser des cotisations présentées comme une épargne personnelle ;
  • les fonds privés seraient moins corruptibles, moins influençables et moins sensibles à l'instabilité politique que l'État ;
  • l'épargne collectée pourrait bénéficier à l'économie locale.

D'autres organisations, comme le Bureau international du travail (BIT) ou l'Association internationale pour la Sécurité sociale (AISS) professent une plus grande méfiance à l'égard des marchés comme instruments de régulation des institutions de Sécurité sociale.

Le cas du Chili a longtemps polarisé le débat. En 1981, le gouvernement du général Pinochet a en effet décidé de remplacer l'ancien système par répartition (qui restait cependant en vigueur pour ceux qui le souhaitaient) par un régime par capitalisation, géré par des fonds de pension privés. Depuis, des mécanismes redistributifs ont été ajoutés au système. Certains pays d'Amérique latine (Bolivie, Mexique ou Salvador) ont choisi également la voie de la capitalisation dans les années 1990, alors que d'autres ont conservé leurs régimes par répartitionRépartition (retraite par)<p>Mode de gestion technique des systèmes de retraite fondé sur la solidarité entre générations : les cotisations des actifs au titre de l'assurance vieillesse servent immédiatement à payer les pensions des retraités.</p> ou ont opté pour des systèmes mixtes.

L'Inde, de son côté, a mis en place un système public par capitalisation dès 1952, mais celui-ci ne couvre qu'une petite partie des actifs. La Chine s'est dotée d'un système à 3 piliers (retraite de base, comptes individuels obligatoires (théoriquement par capitalisation), assurances volontaires). Le vieillissement rapide de la population contraint les autorités à prendre d'importantes mesures pour assurer le financement à long terme du système (augmentation des cotisations et de l'âge de départ).

Des réformes aux finalités communes

Au cours des dernières années, tous ces pays ont entrepris des réformes. Leur but commun était de lutter contre la pauvreté des personnes âgées en créant ou renforçant un « 1er pilier » solidaire (avec des résultats réels, notamment en Amérique latine), et de construire des systèmes financièrement viables pour assurer un meilleur niveau de vie à une population âgée en pleine expansion. Mais au final, l'efficacité de ces efforts dépend davantage du niveau de développement économique que des options choisies (entre capitalisation et répartition, gestion publique ou privée). On observe également une convergence vers la superposition de régimes de type « minimum vieillesse », de régimes obligatoires assis sur les contributions, et de régimes facultatifs. Tout le débat porte désormais moins sur le mode de fonctionnement de ces régimes que sur le poids à donner à chaque pilier et à l'ajustement des paramètres.

Les pays moins avancés : lutter contre la pauvreté

Certains pays – essentiellement ceux de l'Afrique subsaharienne – n'ont pas encore véritablement opéré, ni même parfois entamé, leur transition démographique. La fécondité reste à des niveaux élevés (4,7 enfants par femme en Afrique, contre 2,5 en moyenne dans le monde), et l'espérance de vie demeure très en dessous de la moyenne mondiale (63 ans contre 72 ans).

Dans ces pays, les systèmes de retraite sont encore très peu développés. La priorité demeure la lutte contre la pauvreté. Quand ils existent, les programmes de Sécurité sociale mettent l'accent sur des régimes alimentés par l'impôt et versant des allocations universelles. Le vieillissement devrait cependant concerner également ces régions à l'avenir. Le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans en Afrique subsaharienne pourrait passer de 46 millions en 2015 à 161 millions en 2050. Certains pays anticipent déjà ce besoin émergent.

On s'oriente donc, dans cette zone, vers la mise en place de systèmes à plusieurs piliers, garantissant à la fois des revenus de solidarité et des revenus de remplacement. Mais l'évolution en est encore à ses débuts. L'Association internationale de la Sécurité sociale (AISS) évalue aujourd'hui que seuls 5 à 10 % des habitants de l'Afrique subsaharienne sont couverts par des régimes de Sécurité sociale.

Ce qu'il faut retenir sur la retraite dans le monde (hors Europe)

Les pays développés font face aux mêmes problèmes (vieillissement de la population, ralentissement de la croissance) et fournissent les mêmes réponses (« réformes paramétriques » augmentant les cotisations et l'âge de départ).

Les pays émergents, qui ne connaissent pas encore de problèmes démographiques, se focalisent sur le développement du système de retraites ; là où l'économie informelle et le manque de confiance envers les institutions compliquent la collecte des cotisations.

Les pays moins avancés sont surtout focalisés dans la lutte contre la pauvreté, même s'ils finiront eux aussi, tôt ou tard, à être concernés par le vieillissement de leur population.

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